timbre freinet

 

Le rappel constant des objectifs généraux

Le rappel constant des objectifs généraux

Célestin Freinet, un éducateur pour notre temps

Michel Barré

 

Néanmoins, Freinet reste conscient que des initiatives partant dans tous les sens pourraient faire oublier l'axe de la progression. Aussi rappelle-t-il périodiquement les objectifs généraux et les choix fondamentaux. Les éditoriaux qu'il écrit dans le bulletin L'Imprimerie à l'Ecole (IE) servent généralement à ce recentrage de l'action, mais on aurait tort de ne porter l'attention que sur eux. Une lecture vigilante du bulletin montre que toute occasion lui est bonne pour rappeler, par petites touches, les caps importants : courte réaction au bas d'un témoignage (le renforçant ou le nuançant); réponse à un courrier de lecteur; et surtout notes de lecture. Il arrive que l'éloge ou la critique d'un article ou d'un livre, pas forcément pédagogique, révèle davantage sa pensée que l'éditorial du même bulletin. Je ne citerai que ses critiques de L'éducation fonctionnelle de Claparède (IE n° 47, p. 100), de Mobilisation de l'énergie de Charles Baudouin (n° 49, p. 164), de Signification biologique de l'éducation* de Paul Brien (n° 50, p. 199), de L'éducation physiologique du Dr Seguin (n° 51, p. 230), de L'épopée du travail moderne (la merveilleuse transformation de l'Union Soviétique) de M. Iline (n° 52).

* Voici un extrait du commentaire de Freinet : Ce livre (...) donne aux éducateurs une bonne leçon de bon sens et d'humilité. A ceux qui voudraient faire croire que l'éducation peut transformer le monde, il rappelle les principes naturels (...). Est-ce le langage d'un homme qui prétendrait faire la révolution par la pédagogie?

Dans son rappel des choix fondamentaux, Freinet ne cache pas ses opinions politiques mais il les affirme comme témoignage personnel, sans chercher à imposer ses vues et, compte tenu de leur refus commun du dogmatisme et de l'endoctrinement, ceux qui ne partagent pas ses positions de communiste n'y voient pas matière à conflit. A cet égard, l'éditorial de février 32 (IE n° 49, p. 137) L'école prolétarienne et la crise pose nettement le problème. Après avoir rappelé les effets de la crise sur les enfants de chômeurs ou de métayers et les conséquences de la sous-alimentation, du manque de chauffage et de vêtements sur le comportement à l'école, il poursuit : Ce n'est malheureusement pas la pédagogie qui diminuera la misère ouvrière; ce ne sont pas davantage les considérations psychologiques qui peuvent influer sur notre état social et scolaire. Nous sommes dominés par une fatalité économique contre laquelle seule la force ouvrière luttera efficacement. (...) En dehors de la classe en nous mêlant, chacun avec notre tempérament particulier aux luttes sociales, syndicales et politiques.